La facture des troubles politiques s’annonce déjà élevée pour l’économie thaïlandaise, qui n’avait pas besoin de ça, compte tenu de la récession mondiale qui pèse déjà sur le niveau des exportations. L’industrie du tourisme et bien entendu la première concernée avec des pertes chiffrées entre 80 et 230 milliards de baht selon la durée du conflit, qui coïncide malheureusement avec le début de la haute saison touristique en Thailande.

A plus long terme, la Thailande a aussi compromis une chose difficilement chiffrable dans l’immédiat: son image de marque, c’est à dire celle d’un pays stable et accueillant.

La fermeture de l'aéroport de Bangkok représente une perte de 5,3 millions d'euros par jour.

Bien que les problèmes politiques et les manifestations de rue aient toujours existé en Thailande, les analystes observent que la prise d’assaut et la fermeture de l’aéroport international de Bangkok, représente une nouvelle escalade qui est particulièrement dommageable pour l’image de la Thaïlande, et aura des incidences à long terme pour les investissements et le tourisme. L’industrie du tourisme, qui représente 6 à 7% du produit intérieur brut, sera la plus touchée car Décembre et Janvier sont pour la Thaïlande les mois de haute saison touristique.

“Pour l’instant, nous avons les yeux tournés vers les touristes bloqués à l’aéroport, mais le vrai problème risque d’arriver plus tard avec les annulations de projets d’investissement “, observe un consultant basé à Bangkok.

Les analystes prévoient que la baisse des marchés boursiers sera limitée par le fait que les investisseurs étrangers ont déjà largement retiré leur fonds de la Thaïlande –  en partie à cause de l’incertitude politique, mais surtout en raison d’une fuite générale des marchés émergents, conséquence de la crise mondiale. Les étrangers ont environ encore 90 milliards de baht (2,6 milliards de dollars),  investis dans des actions de Thaïlande, en recul par rapport aux 238 milliards de bath (6,9 milliards de dollars) encore placés à la fin de 2007.

Heureusement la Thaïlande aborde cette crise avec des fondamentaux solides, et notamment des réserves de change qui s’élèvent toujours à 100 milliards de dollars. Dans le pire des cas, où les investisseurs étrangers retireraient le reste de leurs placements en Thaïlande, et que le pays perde 2,5 milliards de dollars en recettes touristiques, ce serait encore l’équivalent de seulement 5% des réserves de change de la Thaïlande. De ce point de vue, il n’y a pas de raison de céder à la panique: le SET a déjà perdu près de 60% depuis le début de l’année, et d’une certaine façon il a déjà intégré les mauvaises nouvelles.

Le plus préoccupant sera sans doute l’impact des turbulences politiques sur les investissements étrangers directs – qui risquent de se diriger vers la concurrence des pays considérés comme moins risqués politiquement. Les investissements japonais sur la période de janvier à septembre 2008 s’élèvent à  46 milliards de baht contre 93 milliards pour la même période en 2007, soit un recul de plus de 50%…

L’indicateur de gouvernance de la Banque Mondiale, un classement annuel des pays en fonction de diverses mesures de gouvernance, reflète bien la chute de la Thailande qui affiche cette année un indice de stabilité politique, de seulement 16,8 sur 100, alors qu’il était de 44,7 en 2003. La Thaïlande se retrouve ainsi dans le bas du classement en termes de stabilité politique, loin derrière ses concurrents régionaux comme le Vietnam (56,3) et la Malaisie (52,4), et pas très loin de pays comme l’Indonésie (14,9) et les Philippines (10,1) considérés comme aillant un niveau de risque élevé. Même si cette descente semble exagérée, les investisseurs sont très sensibles à ce genre d’enquêtes lors de leur prise de décision. La Thaïlande a également fortement reculé dans le classement du Forum économique mondial qui évalue les pays selon leur compétitivité à l’échelle mondiale.

Un autre indicateur, un peu technique, reflète la méfiance croissante des investisseurs : la hausse de contrats à 5 ans de “credit default swaps” – des contrats qui protègent les investisseurs contre les défauts de paiement et qui ont fortement augmenté dès la prise de l’aéroport de Bangkok, passant de 285 bps à 315. Cela signifie qu’il en coute désormais   315,000 dollars pour se prémunir contre un défaut de paiement de 10 millions de dollars investis dans la dette souveraine de la Thailande.

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12 milliards de canettes

Selon le dernier classement Forbes, Chalerm Yoovidhya, co-propriétaire de Red Bull, est à la tête de la famille la plus riche de Thaïlande cette année, devançant pour la première fois les frères Chearavanont du groupe CP.