Qu’est ce que la Thaïlande peut attendre, ou craindre, de l’élection du nouveau président des États Unis ? L’administration Bush se termine sur un bilan assez calamiteux, aussi bien politique que économique, et la domination Démocrate (également majoritaire au Congres) appellera sans doute une redéfinition des rapports entre les deux pays.

Le président sortant George W. Bush aura consacré beaucoup de temps, et d’argent, a sa «guerre contre le terrorisme», entrainant un cout élevé pour les finances et la crédibilité américaine – y compris pour son allié stratégique en Asie du Sud Est, la Thaïlande. Bangkok aura été un allié réticent des campagnes militaires américaines, en fournissant un petit nombre de troupes a la coalition des volontaires en Irak, tout en permettant l’accès des avions américains a ses base aériennes pour la campagne d’Afghanistan. A moins de considérer la torture, la détention arbitraire et le non respect le plus élémentaire des droits de l’homme, comme des pratiques recommandables, aucun allié des États-Unis ne sort grandi de sa collaboration avec l’Amérique de Bush.

Thaïlande et États-Unis: vers une nouvelle donne ?

La Thaïlande en fait partie, et elle a participé aux missions secrètes de la CIA, où des agents du renseignement thaïlandais ont travaillé main dans la main avec leurs homologues des États-Unis, mettant en pratique certains exercices assez peu en rapport avec le respect de la loi et de la démocratie.
Même si le gouvernement thaïlandais l’a toujours fermement démenti, Bangkok a très probablement hébergé des prisons secrètes de la CIA, où des terroristes présumés en provenance des pays tiers ont été arrêtés et apparemment torturés. Ces graves accusations, toujours démenties par les fonctionnaires thaïlandais, ont été révélées pour la première fois dans un article du Washington Post, et plus tard confirmées par des responsables américains, lors de la controverse qui a éclaté sur l’usage de la torture sur des personnes soupçonnées de terrorisme. De ce point de vue l’Amérique d’Obama ne pourra pas ressembler a celle de son prédécesseur, mais l’image ternie de la patrie de la démocratie sera longue a restaurer a l’étranger.
Sur le plan économique, la Thaïlande reste fortement dépendante des exportations vers son principal partenaire commercial, les États Unis. La crise de 2008, devrait aussi aboutir a une certaine remise à plat des relations entre les deux pays, car cette fois le mauvais vent est arrivé en provenance des États Unis. Le modèle de croissance mondiale des années Bush est pour ainsi dire l’inverse de celui qui avait provoqué la crise de 1997: il repose sur des excédents en devises des pays asiatiques, et un déficit commercial et un endettement américain croissant. La Thaïlande et surtout la Chine ont engrangés des réserves de change importantes depuis les dix dernières années, et disposent actuellement des devises nécessaires pour couvrir leurs dettes à court terme, tant publique que privée.

En 1997, l’économie thaïlandaise avait un déficit des paiements courants considérable, et le baht surévalué par rapport au dollar était vulnérable aux attaques spéculatives. La leçon a été bien comprise: depuis dix ans, les gouvernements successifs ont géré leur monnaie de manière à s’assurer un taux de change favorable aux excédents commerciaux.

Le déficit commercial Chine - Etats-Unis

Les États-Unis sont devenus pendant cette période le consommateur mondial qui tire la croissance par les exportations. Mais cette consommation a été surtout financée par un crédit rendu facile (trop facile peut être ?) et peu couteux par une politique de taux d intérêt très accommodante de la Réserve fédérale. Sous l’administration Bush, la FED a fortement réduit ses taux d’intérêt a partir de 2001, le gouvernement réduisant aussi les impôts pour combattre la récession, encourageant ainsi les Américains à dépenser pour retrouver le chemin de la prospérité, et aussi de la propriété immobilière. Beaucoup d’argent a été distribué sous forme de crédits, sans trop se soucier des contreparties.

Les politiques américaine et asiatique sont alors devenues dangereusement complémentaires. La consommation et les déficits commerciaux des Américains trouvant leur contrepartie dans l’accumulation des réserves et des excédents commerciaux des pays asiatiques. Ce modèle n’est pas mauvais en soi, mais dans ce cas particulier il repose sur un recours systématique à l’endettement (10 trillions de dollars de dette US) et au déficit qui a fini par provoquer la correction que l’on sait. Avec une légitimité politique en berne et un modèle de croissance économique qui ne fonctionne plus, les États Unis sont mal placés pour assumer leur place de leader mondial et de super puissance. Le moment est sans doute propice pour les puissances régionales, dont la Thaïlande fait partie, pour suggérer une nouvelle répartition des rôles sur la scène politique mondiale.

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