La Thaïlande pays du sourire ? A condition d’éviter la case prison où l’on découvre une surpopulation choquante et des conditions de vie moyenâgeuses.

Les prisons thaïlandaises ne renvoient pas une image des plus glamour, et leur réputation n’en fait pas un lieu de villégiature recommandé. Au pays du sourire, quand les barreaux se referment derrière vous, c’est une autre facette du pays que l’on découvre.

Les statistiques des prisons thaïlandaises sont effrayantes: en 2018, 330.774 personnes sont incarcérés en Thaïlande soit 478 personnes pour 100 000, plaçant la Thaïlande à la 25e place dans le classement mondial des taux de population carcérale, et à la deuxième place de l’ASEAN après l’ultra répressive Singapour (213 pour 100.000 habitants).

A titre de comparaison en France la population carcérale est de 68.514 détenus avec seulement 3,3% de femmes, pour une population totale de 67,5 millions d’habitants.

Lors d’une conférence donnée à L’Université Thammasat, Danthong Breen, Président de l’Union pour les Libertés Civiles (UCL), la plus ancienne ONG en Thaïlande, a présenté un rapport décrivant l’univers carcéral en Thaïlande.

En collaboration avec la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), l’UCL s’était fixé pour objectif en 2004 de faire un état des lieux de la peine de mort. Après avoir observé les conditions de vie dans la prison de haute-sécurité Bang Kwang, leur intérêt s’est élargi à l’ensemble du système carcéral.

prison stats - thailande-fr

Depuis 2004, bien que l’ONG ait constaté des améliorations dans cette prison, la surpopulation carcérale reste endémique en Thaïlande, et les conditions de détentions d’une autre époque: en 2011 les hommes condamnés à mort doivent toujours porter 24 heures sur 24 des chaînes aux pieds.

Le grand espoir vient malgré tout du fait que le gouvernement thaïlandais a promis d’abolir la peine de mort d’ici 2013 pour la remplacer par des peines de prisons à vie.

Malheureusement, ils entendent prendre au pied de la lettre la sentence « prison à vie », imitant en cela le piètre modèle américain. Les détenus risquent donc de continuer à mourir en prison.

Une surpopulation endémique

Les statistiques des prisons thaïlandaises sont effrayantes: en 2018, 330.774 personnes sont incarcérés en Thaïlande soit 478 personnes pour 100 000, plaçant la Thaïlande à la 25e place dans le classement mondial des taux de population carcérale, et à la deuxième place de l’ASEAN après l’ultra répressive Singapour.

Le paramètre clé des prisons thaïlandaises, et qui est la source de la plupart des problèmes, est sans conteste la surpopulation carcérale. Les immenses dortoirs collectifs renforcent les problèmes d’hygiène, de santé, et le manque d’intimité, tout comme cela augmente le risque de violences entre prisonniers et l’impossibilité d’établir un suivi individualisé.

exercice thai prison
Une majorité de détenus sont incarcérés pour des affaires liées à la drogue

La surpopulation dans les prisons du Royaume est principalement due à trois facteurs : beaucoup trop de détentions préventives avant que le procès n’intervienne, parfois deux ans plus tard ; au regard des standards internationaux, certaines peines sont beaucoup trop sévères, cruelles et inutiles pour la société ; un manque criant de solution alternative à l’enfermement carcéral.

Le taux d’occupation est de l’ordre de 230 %, donnant à la Thaïlande la huitième place mondiale des prisons les plus (sur)peuplées. Les plus de 300 000 prisonniers doivent se partager environ un mètre carré chacun pour dormir…

La surpopulation est le principal problème des prisons en Thaïlande
La surpopulation est le principal problème des prisons en Thaïlande
Total de la population carcérale (y compris les prévenus et les détenus)330 774 au 1.2.2018 (administration pénitentiaire nationale)
Taux de population carcérale (pour 100 000 habitants de la population nationale)478 sur la base d’une population nationale estimée à 69,23 millions à la fin février 2018 (d’après les chiffres des Nations Unies)
Prévenus / détenues ou prévenus en pourcentage de la population carcérale.18,8% (1.2.2018)
Source
Prisonniers féminins (pourcentage de la population carcérale)13,3% (1.2.2018)
Source
Juvéniles / mineurs / jeunes prisonniers (pourcentage de la population carcérale)Les délinquants juvéniles relèvent du Département de l’observation et de la protection des mineurs et ne sont pas inclus dans la population carcérale
Prisonniers étrangers (pourcentage de la population carcérale)
4,6%
(15.9.2016)
Nombre d’établissements / institutions
144
(2014 – 34 prisons centrales, 4 maisons d’arrêt, 24 établissements pénitentiaires, 5 maisons de relégation, 1 maison de détention, 49 prisons provinciales, 27 prisons de district)
Capacité officielle du système pénitentiaire217 000 (17.9.2015 – capacité maximale de conception)
Taux d’occupation (basé sur la capacité officielle)
144,8%
(17.9.2015)

 

Assez curieusement, pour les femmes, c’est encore pire. Elles sont encore plus serrées dans leurs dortoirs que les hommes. Une cellule de 12 mètres sur 19 peut contenir jusqu’à 200 prisonnières, ce qui fait dire à Danthong Breen que

“Si l’une d’entre-elles venait à se lever pour aller aux toilettes durant la nuit, elle n’aurait de toute évidence plus aucune chance de retrouver une place pour dormir.”

Les couloirs de la mort

Bien que très peu d’exécution continue à avoir lieu (moins de dix depuis huit ans), la condamnation à la peine de mort existe toujours en Thaïlande.

Les condamnés qui patientent dans une aile spéciale de la prison de Bang Kwang sont isolés des autres détenus, maintenus au confinement et les chaînes aux pieds. Ce traitement est contraire aux lois internationales ainsi qu’à la loi thaïlandaise.

Thai prison
Les statistiques des prisons thaïlandaises sont effrayantes: en 2011, 224.292 personnes sont incarcérés en Thaïlande soit 331 personnes pour 100 000

Encore plus cruel, le condamné à mort ne saura jamais l’année, le mois, le jour et l’heure de l’exécution. Il n’en sera informé que le jour où les gardiens viendront le sortir de sa cellule pour l’emmener se faire piquer dans la salle d’exécution, elle, climatisée.

Inversement, au jeu des amnisties, des réductions de peines et du pardon royal, un détenu peut être libéré du jour au lendemain sans qu’il n’en sache trop la raison, c’est un petit peu la loterie.

Certains sont condamnés pour des crimes graves, mais, selon un rapport du comité des droits de l’homme thaïlandais datant de 2005, 70% des quelques 800 condamnés à mort l’étaient pour trafic de drogue, la plupart étant non pas de grands trafiquants mais de simples livreurs ou courtiers.

Une majorité de détentions liées à la drogue

Indépendamment des condamnés à morts, les prisons thaïlandaises sont remplies d’individus mis en détention pour des faits liés à la drogue.

Ils ne représentent pas moins de 57% de l’ensemble de la population carcérale, un tiers d’entre eux ayant moins de 25 ans. Système répressif à souhait, la réhabilitation ou des peines aménagées n’existent tout simplement pas.

Curieusement, les détenus convaincus de méfaits liés à la drogue sont les moins bien traités dans les prisons. Des droits dont peuvent bénéficier d’autres types de prisonniers ne leur seraient pas accordés, sans compter d’éventuels punitions qu’ils recevraient plus fréquemment comme les coups, porter des chaînes, effectuer des travaux pénibles en pleins soleils, le confinement ou la restriction de visites.

Les meurtriers seraient finalement mieux traités que les trafiquants de drogue: l’homicide serait presque considéré comme un “métier” plus honorable dans l’échelle de valeurs carcéral.

230 baht pas mois

Tout comme les hommes, les femmes peuvent travailler dans des usines situées dans l’enceinte de la prison, à condition que leur jugement ait déjà été prononcé. L’exploitation de leur travail est frappante eu égard à leurs salaires de 700 bahts tous les 3 mois !

Selon Danthong Breen,

“c’est pire que les hommes pour les femmes je crois parce qu’elles ne protestent pas, donc rien ne change”.

Tout n’est pas si terrible dans la prison pour homme de Bang Kwang. En effet, contrairement à bon nombre de pénitencier français, la vie des détenus ne se limite pas à une longue discussion avec les murs en béton.

Durant la journée, les détenus peuvent sortir dehors, se promener sous les palmiers, cultiver quelques fruits et légumes, jouer au foot, faire un peu de commerce, étudier, travailler. Surtout, en comparaison avec les prisons standards européennes, les prisonniers sont moins seul socialement et plus libres dans leurs mouvements dans la journée.

Les étrangers, notamment des « farangs », font partie de la population carcérale en Thaïlande, souvent pour des délits liés à la drogue.

Bon nombre de livres à sensation sur cette expérience ont d’ailleurs été écrits sur le sujet par ceux qui ont passé quelques temps dans ces lieux.

Prison thaïlandaise : la vision hollywoodienne dans la scène d'ouverture de Hangover III
Prison thaïlandaise : la vision hollywoodienne dans la scène d’ouverture de Hangover III

Leur vie à l’intérieur des geôles thaïes n’est pas en soi différente de celle des locaux. Ils partagent les mêmes dortoirs que les détenus thaïlandais et se plient aux mêmes règles.

Cette promiscuité peut être ainsi encore plus difficile à vivre pour un occidental habitué au confort, et qui soudainement tombe au niveau de vie d’une famille pauvre de l’Isan.

Contrairement aux locaux, les détenus étrangers n’ont pas le droit de travailler, donc de gagner un peu d’argent.

Pour les cas de ceux qui n’ont pas de famille ou dans les cas des très longues peines, cela devient très difficile de simplement survivre puisque l’administration pénitentiaire ne fournit quasiment rien aux prisonniers, si ce n’est une nourriture de piètre qualité en comparaison avec la qualité gastronomique du pays.

Pour remédier à ce manque criant de ressources, Danthong Breen a décidé de mobiliser les États européens sur le sujet de leurs ressortissants emprisonnés à l’étranger. Dans une lettre adressée au Conseil de l’Europe et à ’Union Européenne, il préconise que chaque pays octroie 30 Euros par mois à chacun de leur citoyen en prison à travers le monde.

Ce petit revenu mensuel ne devrait pas grever les budgets nationaux et permettrait à bon nombre de détenus isolés tant financièrement que socialement de bénéficier d’un peu d’aide extérieur. Surtout, le président de l’UCL nous assure que “cela permettrait à certains de retrouver un niveau de vie un peu plus digne à l’intérieur des barreaux”.

site officiel des prisons en Thailande : http://www.correct.go.th/newcorrectweb/index.php/home

Thaiprisonlife.com un excellent site sur la vie quotidienne dans les prisons thaïlandaises

13 comments
  1. Message à toutes les lumières qui ont commenté cet article sans rien savoir: la plupart des prisonniers en Thailande pour drogue le sont pour consommation, alors que la guerre contre la drogue est perdue et que cela ne sert à rien d’enfermer les consommateurs, même les mongols savent ça ! Je ne vous souhaite pas que vos enfants se fassent serrer pour consommation puisque dans votre idée ils devraient aller crever en taule !

  2. comment un français peut il donner des leçons à un pays qui protège si bien sa population de la délinquance et dans lequel une femme peut sortir seule à toute heure du jour ou de la nuit sans crainte!

    1. Je suis parisienne et même le jour maintenant, il est dangereux de sortir seule.Avec une population dite de migrants,et les Roms,vous vous faites agressée de jour.Nous sommes si bien protégés que la police ne peut rien faire devant la recrudescence des agressions tant que vous n’etes pas mort.On ne peut pas se défendre car nous nous mettons en tord devant la loi.La France protège personne sinon les voyoux!Pour votre info,je me suis faites agressée deux fois,vol de bijoux à 4 heure de l’après midi et arrachage de sacs à main à 8 heure du matin !Vive le France !

  3. je pense que la personne ayant écrit cet article est un consommateur de stupéfiants.Pour moi un dealer quelque soit son niveau est un tueur et un tueur en série.Qu’il regarde et suive attentivement la descente aux enfers d’un gamin qui consomme leur drogue .LesThailandais sont très intelligents,et ils ont le courage de punir les délinquants.La prison n’est pas le club med et si la France pouvait prendre exemple,ce serait très bien.Si tu es honnête,pas de prison .Mettez vous à la place des victimes tout de meme et oser demander 30euros pour des gens qui ne valent pas un sous!

  4. apparement l auteur prefere que les criminels soient relaches et puissent recommencer comme en europe plutot qu ils restent en prison a vie ou qu ils soient executes …c est a cause de gens comme ca que la recidive existe , les gens dont les proches ont ete tues ou violes par des recidivistes peuvent dire merci aux gens comme vous ! bravo !

  5. Ben fallait èpas aller livrer de la drogue ou en trafiquer ! après faut pas venir chialer , ils le savent avant de commencer après faut pas jouer les victimes , en Chine ils auraient eu une balle en pleine nuque et c’est que justice !!! On pense aux victimes de cette drogue de merde ???

  6. A propos de la surpopulation, je me demandais pourquoi le gouvernement français ne construisait pas plus de prisons. Combien ça peut coûter une prison au fait ? 100 M€ ? 200 M€ ? …aucune idée mais peu importe. Sur un budget de 1500 Milliards et une dette de 2000 milliards qu’on ne remboursera jamais, ça parait un peu faible.
    Et pourquoi pas construire une prison rentable ? Les détenus seraient alors condamnés à bosser pour la prison, donc pour l’état.
    … hein ? Ouais, un peu comme nous tous d’ailleurs.

    Quant à l’univers carcéral thaï, je ferai tout mon possible pour l’éviter. Promis. On trouve quelques vidéos sur Youtube qui, après coup, vous poussent à bien vérifier vos bagages à l’aéroport 😉

    30 € par mois pour les prisonniers français à l’étranger ? Payés avec mes impôts ? Tu déconne là ? …

    L’article était bien orienté à propos de la peine de mort commuée en peine à vie, et c’est vrai que c’est énervant. Comment pourrais-je tolérer des pensées permissives avec des condamnés à mort ? Ils n’ont certainement pas été condamnés à la légère et ils ne devraient jamais être remis en liberté. Pour s’en convaincre, il suffit de se mettre à la place des victimes, ne serait-ce que 2 minutes. Et pensez aux familles des victimes !

    Un point sur l’orthographe pour égayer le propos :
    “l’échelle de valeurs carcéral.”
    “Lors d’une conférence donné à L’Université”

    Meilleurs voeux

  7. Instaurer les même condition de vie/nourriture en Europe créerai le chômage de plusieurs milliers de personnel pénitentiaire ainsi qu’un départ gigantesque des habitués vers leurs pays d’origine .

  8. quand est il du centre de détention de l immigration a suanplu Bangkok ?
    what about the IDC immigration detention center in Suanplu Bangkok ?

  9. Tout à fait impartial, effectivement.
    Ce qui console, c’est que nos “pépites” des quârtchiers qui se font pincer là bas doivent découvrir autre chose que les prisons quatre étoiles de la république, ce qui leur donne sûrement le goût de ne pas recommencer.

    1. Concombre masque, vous ne connaissez apparement pas les prisons francaises pour les appeler “prisons 4 etoiles” !!! … alors donc faire un tour a Fleury-Merogis , les Baumettes ou Saint Paul a Lyon, vous changerez d avis …

      1. Non merci je préfère rouler sur les rails et ne pas faire ce genre de visite… Mais à chacun ses gouts !!!

  10. J’adore l’impartialité de ce genre d’article, incapable de laisser son libre arbitre au lecteur pour penser ce qu’il veut.
    “Le grand espoir vient malgré tout du fait que le gouvernement thaïlandais a promis d’abolir la peine de mort d’ici 2013 pour la remplacer par des peines de prisons à vie. Malheureusement, ils entendent prendre au pied de la lettre la sentence « prison à vie », imitant en cela le piètre modèle américain. Les détenus risquent donc de continuer à mourir en prison.

    « C’est un bon début nous dit Danthong Breen, mais s’ils continuent de les laisser enfermer jusqu’à la fin, ça ne change pas grand chose à la peine capitale. »”

    Mon dieu, ils veulent continuer à apliquer à la lettre le terme “prison à vie!” Ca veut dire que leurs Fourniret, leurs Guy Georges et leurs Marc Dutroux à eux ne sortiront sans doute jamais, ne retrouveront jamais leurs droits civiques! Quelle horreur! C’est injuste! Faites les sortir de là, vite, nos petites filles s’ennuient, il y a davantage urgence à réhabiliter ces individus qu’à les punir!

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