Cette fois il n’y a pas de doute, l’épreuve de force aura bien lieu, même si d’après les déclarations des principaux dirigeants de l’UDD (Union pour la democratie contre la dictature) , elle devrait être non violente. Le gouvernement thaïlandais a exclu de négocier avec Thaksin Shinawatra, dont les partisans promettent une manifestation massive à Bangkok. 

Entre 600.000 et 1 million de personnes sont attendues dans les rues de la capitale le 14 mars, après une mobilisation de toutes les provinces à partir du 12, dans l’espoir d’obtenir des élections anticipées. Le vice-Premier ministre Suthep Thaugsuban, en charge de la sécurité, a reçu la permission du gouvernement pour invoquer la loi sur la sécurité intérieure qui autorise l’armée à prendre le contrôle du maintien de l’ordre en cas de nécessité.

" En faisant venir 1 million de personnes dans Bangkok nous allons obliger le gouvernement Abhisit a choisir entre la dissolution et la suppression de notre mouvement."

Suthep Thaugsuban a reconnu qu’un rapport des renseignements mettait en garde contre  la présence possible de 30 à 40 petits engins explosifs à travers la capitale thaïlandaise ce week-end, mais il a promis que le gouvernement ne permettra pas aux manifestants anti-gouvernementaux d’occuper des bâtiments officiels, ou l’aéroport de Bangkok.

Pour empêcher qu’une situation identique à celle de décembre 2008 ne se reproduise, lorsque les “chemises jaunes” avaient bloqué le trafic aérien dans la capitale, le gouvernement a approuvé l’utilisation de la loi de sécurité intérieure (ISA), à partir du jeudi 11 mars pour près de deux semaines, dans tout Bangkok et Nonthaburi, plus un certain nombre de districts dans six autres provinces entourant la capitale.

Le risque de débordements plus ou moins violents est réel, même si l’UDD affirme que ses intentions sont pacifiques. Visiblement le coup d’État de 2006 a réouvert des plaies mal cicatrisées, si l’on en croit une partie des dirigeants pro Thaksin qui se réclament de la génération 1976, en référence aux manifestations réprimées par l’armée et qui avaient plusieurs dizaines de morts.

Le Dr Weng Tojirakarn au cours d'une conférence de presse de l'UDD, annonçant la manifestation du 14 mars

En 1976, le Dr Weng Tojirakarn était un jeune dirigeant du mouvement étudiant et participait à une manifestation qui s’est terminée par des tirs de l’armée, tuant plusieurs de ses collègues manifestants. Comme beaucoup d’autres militants de l’époque, il a fui vers la campagne, où le Parti communiste offrait un refuge pour de nombreux membres de l’intelligentsia radicale de l’époque. Weng est aujourd’hui un des responsables de l’UDD. Plusieurs de ces militants sont devenus des  leaders des chemises rouges, comme le Dr Weng. Certains, comme Chaturon Chaisang, étaient membres du gouvernement de l’ancien Premier ministre thaïlandais Thaksin Shinawatra.

Le passé c’est le passé et aujourd’hui nous avons rompu avec les parties violentes du mouvement des chemises rouges. L’UDD rassemble des mouvements qui veulent une vraie démocratie avec sa majesté le roi comme chef de l’État. Actuellement l’élite bureaucratique (Amart) est un obstacle à la démocratie, et c’est contre cela que nous luttons, et rien que cela. Nous voulons la même justice pour tout le monde, pas de double standard et le retour de la constitution de 1997.

précise Weng Tojirakarn

Selon Sean Boonpracong, il y a eu une rupture avec la fraction violente des chemises rouges représentée par des gens comme Sae Deng.

L’UDD a tenu une conférence de presse pour expliquer sa stratégie en ce qui concerne la tenue de la manifestation du 14 mars à Bangkok. L’objectif de 1 million de personnes est maintenu, même si les organisateurs reconnaissent qu’il ne sera pas facile à atteindre, en raison des restrictions et des pressions imposées par le gouvernement. Les responsables de l’UDD ont réaffirmé vouloir tenir une manifestation pacifique, dont le but est d’obtenir des élections anticipées.

Certains essayent de nous faire passer pour des adeptes de la violence, mais c’est faux. Notre mouvement est avant tout pacifique et demande le retour de la démocratie. Nous avons crée des écoles de la démocratie partout dans le pays, et nous avons formé plus de 20000 diplômés qui se chargent de porter notre message dans les villages. Il y a eu une rupture avec la fraction violente des chemises rouges représentée par des gens comme Sae Deng.

a notamment déclaré Sean Boonpracong, le porte parole de l’UDD

Les membres de l’UDD ont prévu de converger vers Bangkok à partir du 13 mars avec plus de 50000 pickup et minibus. La circulation devrait être totalement paralysée dans certaines partie de la ville comme les abords de la place Sanam Luang. L’UDD a déclaré avoir recours à ce moyen de transport, car le gouvernement aurait fait pression sur les compagnies de transport pour les dissuader d’offrir leurs services aux représentants des “chemises rouges”.

Nous allons occuper toute la rue Radjadamoen et les environs et ce sera bien organisé. Si il y a des violences ce sera à cause des provocations du gouvernement. Si il y a eu de la violence lors du sommet de l’Asean à Pattaya et dans Bangkok en avril dernier, c ‘est à cause du gouvernement et de la police. J’étais à Pattaya et j’ai vu des policiers en civil lancer des pierres sur nous.

a ajouté Sean Boonpracong, porte parole de l’UDD.

Jaran Ditthapichai, un des responsables de l’organisation de la manifestation de dimanche prochain a précisé que l’UDD disposera de son propre service d’ordre, constitué pour l’essentiel de volontaires dont les membres seront porteur d’une carte officielle officielle du mouvement.

Nous avons tiré les leçons du passé et nous ne laisseront pas des petits groupes transformer un mouvement pacifique en affrontement violent. Notre but est modeste : nous voulons obtenir la dissolution du Parlement et de nouvelles élections par des moyens pacifiques. En faisant venir 1 million de personnes dans Bangkok nous allons obliger le gouvernement Abhisit a choisir entre la dissolution et la suppression de notre mouvement. Nous n’avons pas l’intention de déclarer la guerre au gouvernement ou de provoquer une guerre civile. Mais si le gouvernement utilise la force contre nous, personne ne sait ce qui pourrait arriver. Nous pouvons facilement  neutraliser une intervention de l’armée, car les soldats sont à 70% des supporters de Thaksin.

a mis en garde Jaran Ditthapichai.

Olivier Languepin

2 comments
  1. C’est facile a comprendre s’il y a de nouvelles elections c’est thaksin qui revient au pouvoir et tout ce qu’ils auront fait jusqu’a maintenant sera un coup dans l’eau, thaksin n’est pas soutenu non plus dans les provinces du sud, plus je le vois plus je le deteste, sa facon de s’accrocher au pouvoir et a ses milliards, d’acheter les gens qui manifestent, l’autre camp non plus n’est pas irroprochable non plus…

  2. On ne comprend pas pourquoi le gouvernement dont la légitimité est contestée par plus de la moitié du peuple s’accroche-t-il au pouvoir?
    La nouvelle élection générale pourra être la seule solution à la crise. Plus la crise se traine plus le mécontentement populaire s’amplifie et le fossé se creuse au sein du peuple. En même temps la personnalité et popularité de Thaksin gagne le top et le gouvernement actuel se discrédite davantage, son action étant limitée à BKK et qques grandes villes du centre.

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