Alors que les autorités de Bangkok ont mis en place une commission d’enquête pour faire la lumière sur les violences commises lors des affrontements entre les forces de sécurité et les chemises rouges en avril et mai 2010, Reporters sans frontières publie un rapport sur dix cas graves d’atteinte à la sécurité des journalistes et à la liberté de la presse.

L’organisation a choisi de donner la parole aux victimes et aux témoins de ces incidents. Certains récits sont accablants pour les soldats de l’armée thaïe qui ont mis en danger de mort les civils non-combattants, notamment les journalistes, et n’ont respecté aucune règle d’engagement. De même, les militants armés au sein des chemises rouges ont été les auteurs de violences inadmissibles contre la presse.

Reporters sans frontières demande notamment aux autorités de rendre publics au plus vite les rapports complets sur la mort des reporters Hiroyuki Muramoto et Fabio Polenghi. S’élevant contre le maintien de l’état d’urgence, l’organisation leur recommande également de lever la censure contre les médias, notamment les sites d’informations actuellement bloqués.

Plus que jamais une enquête indépendante, incluant des experts internationaux, est nécessaire. La crédibilité internationale de la Thaïlande est en jeu. Si le gouvernement est sérieux dans son intention de réconcilier les Thaïs et de tirer les leçons de ces violences, le Premier ministre Abhisit Vejjajiva doit donner des moyens et des pouvoirs bien plus larges à cette commission d’enquête

Le gouvernement est sorti vainqueur de cette bataille sanglante après l’assaut sur le camp des rouges au coeur de Bangkok le 19 mai 2010, mais beaucoup de questions subsistent sur l’attitude des forces armées. Les témoignages multiples à propos de soldats tirant à balles réelles sur des civils désarmés, le mitraillage de journalistes, les intimidations et la militarisation de la répression politique rendent compte de dérives graves.

Dans les derniers jours du conflit, les soldats tiraient à l’arme de guerre sur des civils désarmés, notamment des journalistes. Il n’existait visiblement aucune règle d’engagement pour les soldats livrés à eux-mêmes»,

a expliqué un journaliste à RSF.

La sécurité et la libre circulation de l’information ont été sévèrement malmenées par les représentants de l’Etat et les chemises rouges. Aucun des deux camps n’a respecté le droit des journalistes de travailler en sécurité. Et les autorités, engagées dans une répression féroce de l’opposition, ont fait le choix de maintenir une forte pression sur les médias et Internet, au mépris des engagements internationaux de la Thaïlande, notamment envers le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Les comportements de l’armée et celui des milices rouges sont en complète violation de la Déclaration de Medellin adoptée par l’UNESCO sur la sécurité des journalistes qui réaffirme, dans le prolongement de la Résolution 1738 du Conseil de sécurité des Nations unies, la nécessité de protéger les reporters en zone dangereuse.

estime RSF dans la conclusion de son rapport.