Alors que les élections générales sont imminentes en Thaïlande, les principaux partis continuent de s’affronter à coup de surenchères périlleuses: c’est un peu à qui proposera le plus gros cadeau, le salaire minimum le plus élevé ou le prix garanti le plus cher pour la tonne de riz. Un affrontement un peu au raz des pâquerettes, ou plutôt des rizières.. Le débat politique est plus un affaire de chiffres que de mots ces derniers temps, et encore moins d’idées… La cible principale de ces promesses mirobolantes: les quelques 24 millions d’électeurs ruraux que compte la Thaïlande.

C’est une bataille médiatique d’annonces et de chiffres, qui favorise la pêche aux voix sur le court terme et a peu à voir avec l’intérêt de la Thaïlande sur le long terme. Mais peu importe car gagner une majorité des voix rurales pourrait être un facteur décisif dans l’élection du Parlement qui s’annonce très serrée.

Tempête sur le riz

Le programme de subvention des prix du riz promis par le Pheu Thai offrirait ainsi des paiements de 15.000 baht par tonne pour le paddy de riz blanc et de 20.000 bahts pour Hom Mali, riz parfumé, environ 30% supérieurs aux prix courants du marché. Une hausse séduisante, mais qui dans la plupart des cas profite surtout aux intermédiaires et au gros producteurs qui seuls ont la possibilité d’avoir de gros stocks.

riziere Thailande
Le programme de subvention des prix du riz promis par le Pheu Thai offrirait ainsi des paiements de 15.000 baht par tonne pour le paddy de riz blanc et de 20.000 bahts pour Hom Mali, riz parfumé, environ 30% supérieurs aux prix courants du marché

En Thaïlande la culture du riz occupe dix millions d’hectares, soit la moitié de la surface agricole utile du pays et près de 40% de la population du royaume vit de l’agriculture .

Selon le ministre du Commerce de la Thaïlande Porntiva Nakasai, les exportations de riz thaïlandais pourraient dépasser les 10 millions de tonnes en 2011, pour un chiffre d’affaires de 170 milliards de bahts, soit près de 5,6 milliards de dollars. Chookiat Ophaswongse, président de l’Association thaïlandaise des exportateurs de riz, a même estimé lors d’un récent colloque sur le riz à Bangkok, que le volume des exportations thaïlandaises de riz pourrait atteindre un record de 11 à 12 millions de tonnes cette année.

La demande sur le marché mondial reste en effet très forte depuis le début de l’année, car on constate une diminution de l’offre dans de nombreux pays. La demande des principaux pays importateurs, dont le Bangladesh, l’Indonésie, et les Philippines est aussi un facteur haussier pour le volume d’exportation de riz thaï.

Le Bangladesh par exemple a besoin d’importer environ 10 millions de tonnes de riz par an. Auparavant, l’Inde était un des fournisseurs majeur de riz étuvé pour le Bangladesh, mais l’Inde a continué de suspendre ses exportations de riz en raison de craintes sur sa consommation et sa production intérieure dues à une mousson inhabituelle.

Des répercussions sur les exportations

Toutefois, si le nouveau gouvernement s’engage sur une politique de hausse des prix subventionnes, au lieu de la garantie de revenu appliquée par l’actuel gouvernement,  les exportations pourraient ralentir pendant le deuxième moitié de l’année, et être inférieures à 10 millions de tonnes cette année.

Le volume des exportations pourrait aussi dépendre du résultat des élections:  certains partis politiques en lisse pour le scrutin du 3 juillet prochain ont promis de revenir au système des prix subventionnés (ou prix garantis) en proposant de porter le prix de la tonne à 15000 baht (environ 300 dollars), soit une augmentation de 30% par rapport aux prix actuels garantis de 11000 baht.

Au plus fort de la crise alimentaire de 2008, le prix du prix était monté jusqu’à 800 dollars la tonne, provoquant une spéculation effrénée qui avait surtout profité aux exportateurs et grossistes.

Une augmentation du prix du riz thaïlandais risque alors de créer des difficultés d’exportation, les pays acheteurs se tournant vers d’autres fournisseurs moins chers comme le Vietnam, ou vers d’autres produits comme les céréales.

Lors de la Convention  riz Thaïlande 2011, tenue à Bangkok cette semaine, les participants ont souligné que la gestion du nouveau gouvernement sera un facteur clé pour influencer la compétitivité des exportations thaïlandaises de riz.

En 2035, on estime que 116 millions de tonnes de riz en plus seront nécessaires pour nourrir la population mondiale, tandis que l’Asean aura un besoin supplémentaire de 21 millions de tonnes pour nourrir la population de la région.