La Thaïlande aborde cette année 2010 dans un climat en apparence plus serein que les années précédentes. Sur le plan politique, l’accalmie est réelle: les manifestations de rues, les “sit-in” devant les bâtiments officiels et l’occupation des aéroports de Bangkok fin 2008 ne sont plus qu’un mauvais souvenir. Le gouvernement vient d’entamer sa deuxième année d’exercice du pouvoir, alors que l’année 2008 avait connu pas moins de trois premiers ministres.

Sur le front économique, l’économie thaïlandaise a été durement touchée par la crise économique mondiale, avec une baisse de croissance qui a atteint jusqu’à – 7,1% au second trimestre 2009 mais devrait se limiter à – 3% pour l’ensemble de l’année. Le pays est sorti de la récession au troisième trimestre, les signes de redressement sont nombreux et les indicateurs économiques promettent un retour à une croissance positive située entre + 3% et + 4,5% en 2010. L’environnement général en ce début d’année 2010 constitue donc un réel progrès par rapport aux années récentes, ce qui permet d’envisager l’avenir avec sérénité… mais prudence. Car l’incertitude politique demeure et le redressement économique annoncé ne va pas sans quelques nuages.

Un plan de relance ambitieux pour retrouver le chemin de la croissance

Pour faire pièce à la crise, la Thaïlande a en effet mis en place le “Thai Khem Khaeng”, (une Thailande forte) un ambitieux plan de relance triennal à hauteur de 29,5 milliards d’Euros, soit 1,4 trillion de Thai Baht. Ce plan prévoit des investissements conséquents dans plusieurs secteurs stratégiques comme l’irrigation et la gestion de l’eau; l’amélioration du réseau routier et les transports, avec six nouvelles lignes de métro à Bangkok; l’énergie et les télécommunications, avec la mise en oeuvre attendue de la technologie 3G, pour laquelle le pays a pris beaucoup de retard en raison des ingérences politiques; sans compter des dépenses d’infrastructures dans les domaines du tourisme, de l’éducation et de la santé. Ce plan de relance, qui est à ce jour le plus important dans les pays de l’ASEAN, a commencé à être déployé en octobre dernier et devrait avoir un impact positif sur les chiffres de la croissance 2010.

La Thaïlande a connu au cours des 20 à 25 dernières années un développement économique prodigieux, qui s'est accompagné de l'apparition d'une importante classe moyenne

Economie traditionnellement fondée sur les exportations, celles-ci devraient rebondir de 10 à 15% en 2010, après une contraction de près de 17% en 2009. Mais comme les importations avaient chuté davantage encore, de près de 29%, la Thaïlande aura tout de même bénéficié l’an dernier d’un excèdent commercial de l’ordre de 18,5 milliards de dollars. L’an dernier, le Thai Baht s’est apprécié respectivement de 5% et 3% vis-à-vis de l’USD et de l’Euro.

Les principaux indicateurs macro-économiques du pays restent par ailleurs dans le vert, avec un très faible niveau de chômage (400,000 personnes, soit seulement 1,4% de la population active) et une inflation quasiment nulle. En raison du plan de relance, le déficit public est certes en augmentation mais devrait rester contenu à 53% du PIB en 2010 (contre 44% en 2009), et bien en dessous du maximum légal de 60% prévu par la constitution.

Le développement économique est parfois porteur de contradictions

La Thaïlande a connu au cours des 20 à 25 dernières années un développement économique prodigieux. Il suffit pour s’en rendre compte d’apprécier les infrastructures nouvelles en matière de transports publics ou de réseau routier, ou encore la multitude de centres commerciaux et autres hypermarchés rutilants, parmi lesquels Carrefour et Casino ont su prendre une place significative (voir encadré). Ce développement s’est accompagné de l’émergence d’une importante classe moyenne, avec un PNB par habitant qui est aujourd’hui de plus de 9,000 USD à Bangkok contre 4,000 USD dans le reste du pays.

La crise politique n'a pas encore trouvé son épilogue, et la Thaïlande reste profondément divisée.

En ce début d’année 2010, la Thaïlande semble s’orienter plutôt vers une évolution maîtrisée que vers une mutation radicale de ses structures politiques, économiques et sociales. Mais si les indicateurs économiques laissent présager que la crise est en passe d’être surmontée, l’incertitude politique n’a pas trouvé son épilogue. Depuis quelques années, le pays est profondément divisé entre les pro- et les anti-Thaksin, entre l’élite et une partie des classes moyennes urbaines et les campagnes, entre les pauvres et les riches. Car le développement économique n’a pas profité équitablement à tout le monde. Les inégalités sociales demeurent criantes: 20% de la population possède 69% des richesses du pays tandis que 20% des plus pauvres n’en possèdent que 1%. Introduire davantage d’équité sera l’un des enjeux majeurs de l’avenir, quelles que soient les évolutions politiques.

Paul Dumont

Président – CCE Thaïlande

Extraits de l’article paru dans le numéro spécial PERSPECTIVES 2010  de CCE International (n° 548) et disponible sur le site www.cnccef.org

Une présence française significative

La Thaïlande est un pays comparable à la France, tant par sa superficie (514000 km2) que par sa population (65.5 millions d’habitants). Après Singapour,ce pays constitue notre 2ème marché parmi les pays de l’Asean, tant pour nos exportations, deux fois supérieures à celles vers le Vietnam, que pour nos investissements.

On compte environ 350 entreprises françaises en Thaïlande, dont 60 grands groupes.

La France y occupe le 4ème rang comme investisseur européen derrière le Royaume-Uni, l’Allemagne et les Pays-Bas. Encore ces chiffres ne reflètent-ils qu’imparfaitement la réalité de notre importante présence dans ce pays:

• La communauté française en Thaïlande est la plus importante d’Asie du Sud-est, avec plus de 10 000 Français qui travaillent dans de multiples secteurs de l’industrie et des services;

• On compte environ 350 entreprises françaises, dont 60 grands groupes…

  • Industrie: Michelin, Saint-Gobain, Essilor, Lafarge, Valéo,Legrand, Schneider
  • Energie: Total E&P, Suezo
  • Banque: Credit Agricole et BNP Paribas
  • Services: Accor, Bouygues, Carrefour, Casino, Sodexho

• Et près de 300 PME, dont un grand nombre est dirigé par des entrepreneurs individuels

• Au total, ces entreprises françaises emploient plus de 70 000personnes

• Plus de 3 000 entreprises françaises exportent vers la Thaïlande

• Les échanges commerciaux bilatéraux entre la France et la Thaïlande ont représenté 3 milliards d’Euros en 2008

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12 milliards de canettes

Selon le dernier classement Forbes, Chalerm Yoovidhya, co-propriétaire de Red Bull, est à la tête de la famille la plus riche de Thaïlande cette année, devançant pour la première fois les frères Chearavanont du groupe CP.