C’est un réseau de prostitution d’une ampleur sans précédent que les enquêteurs ont mis à jour dans la province de Mae Hong Song, dans le nord de la Thaïlande, près de la frontière birmane.

Une vingtaine de jeunes filles âgées de 15 à 18 ans auraient subi des séances sadiques de viols collectifs après avoir été droguées et victimes de chantage. Ces pratiques sexuelles devaient satisfaire les fantasmes de hauts fonctionnaires de la police de Mae Hong Son.

Selon les témoignages des victimes, au moins une quinzaine de fonctionnaires et de civils seraient impliqués dont le gouverneur de province.

Onze personnes ont déjà été arrêtées dans ce scandale de prostitution, mais selon certaines sources le nombre de personnes impliquées pourraient être beaucoup plus important.

Selon les confidences d’un policier à RFI, « il y a tellement de policiers et de fonctionnaires impliqués dans ce réseau de trafic humain, que s’ils étaient tous arrêtés le fonctionnement de la province de Mae Hong Son s’arrêterait ».

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La mère d’une victime à l’origine du scandale

L’affaire a été rendue publique fin avril, par la mère d’une des victimes. Cette dernière a découvert une photo de sa fille accompagnée d’autres victimes, toutes forcées à se prostituer par un sergent-major de la police locale.

Elle mena alors sa propre enquête et constata qu’aucun policier au cœur du trafic n’avait été poursuivi.

Les faits se seraient déroulés le 1er octobre lors d’une soirée organisée pour le gouverneur de Mae Hong Son, Suebsak Iamwichan, nouvellement promu. L’enquête débutée en novembre est restée au point mort jusqu’à ce que cette mère diffuse l’affaire sur les réseaux sociaux.

Extrait de la Une du journal The Nation, édtion du 30 avril 2017
Extrait de la Une du journal The Nation, édition du 30 avril 2017

Une tradition depuis plusieurs décennies

Selon le Nvader, une ONG luttant contre le trafic d’êtres humains, ces pratiques seraient une tradition chez les fonctionnaires et dans d’autres secteurs pour satisfaire les hauts gradés.

Lors d’une déclaration le 27 avril, l’enquêteur en chef de l’organisation, Ronnasit Proeksayajiva, affirme que « cette tradition existe depuis déjà vraiment longtemps dans les provinces. »

Dans certains réseaux, les victimes auraient moins de 10 ans, et la plus jeune que le Nvader aurait secourue serait une Cambodgienne de huit ans.

Ronnasit explique qu’il n’est pas difficile de rassembler les informations sur ces réseaux puisque même les garçons d’hôtels seraient informés de ces pratiques. Seulement dans bien des enquêtes, la police se fait juge et partie.

Selon Usa Lertsrisantad, « la prostitution d’enfants existe depuis trois décennies, il est clair que la culture du proxénétisme pour les désirs sexuels des clients continuera de sévir. Le gouvernement devrait faire quelque chose pour cela. »

Un changement possible

C’est ce que le Premier Ministre envisage de faire. Prayut Chan-o-cha a déclaré :

« Depuis le premier jour où j’ai entendu la nouvelle, j’ai ordonné aux autorités compétentes de faire strictement respecter la loi contre les fonctionnaires à tous les niveaux qui seraient liés au cas. Sans exception. »

En effet, les lignes semblent bouger. Premièrement, le scandale a été rendu public et médiatisé. L’enquête ne peut désormais plus reculer. En une semaine, onze mandats d’arrêts et six assignations à résidence ont été déposés.

Le lieutenant-colonel Sitthikamjorn a déclaré à la presse le 3 mai que de nouveaux mandats devraient être délivrés très prochainement.

Le gouverneur de la province s’est vu muté à un poste inactif et a été interrogé par un comité disciplinaire du ministère de l’intérieur. Ce dernier a ouvert une commission d’enquête afin de lever le voile sur cette affaire.

Les investigations sont désormais poursuivies à la fois par la police de la région 5 et par l’ATPD, la division de lutte contre le trafic d’êtres humains. Les résultats de l’enquête devraient être connus fin mai.