Tantawan « Tawan » Tuatulanon, qui est en grève de la faim depuis le 20 avril 2022 pour protester contre sa détention provisoire, devrait être transférée d’urgence dans un hôpital pour être placée sous surveillance médicale, estime Human Rights Watch dans un communiqué publié hier, dimanche 22 mai.

« Les autorités thaïlandaises devraient abandonner les poursuites contre Tantawan et d’autres personnes injustement inculpées pour leurs manifestations pacifiques exigeant des réformes, ou du moins être immédiatement libérées sous caution », a déclaré Elaine Pearson, directrice par intérim de la division Asie à Human Rights Watch.

« Maintenir des militants en détention provisoire pour l’exercice pacifique de leurs droits est punitif et injuste. »

 Elaine Pearson, directrice par intérim de la division Asie à Human Rights Watch.

Tantawan, 20 ans, qui est affilié au groupe pro-démocratie Draconis Revolution, a plaidé en faveur de la réforme de la monarchie et de l’abolition de la loi draconienne de lèse-majesté qui protège la monarchie thaïlandaise avec de très lourdes peines (jusqu’à 15 ans de prison).

15 années de prison pour une opinion discordante

Tantawan a été accusée de diverses infractions pénales, dont la lèse-majesté en vertu de l’article 112 du Code pénal pour avoir mené un sondage d’opinion publique sur les cortèges royaux le 8 février et publié une vidéo en direct sur Facebook critiquant la monarchie le 5 mars. Depuis le 20 avril, les autorités la maintiennent en détention provisoire, une mesure que le tribunal pénal de Bangkok a prolongée à plusieurs reprises.

L’article 112 du Code pénal thaïlandais punit la lèse-majesté d’une peine pouvant aller jusqu’à 15 ans de prison. Ces affaires ne sont que les dernières en date dans lesquelles des militants pro-démocratie thaïlandais accusés de lèse-majesté ont été détenus pendant de longues périodes qui pourraient durer des années jusqu’à la fin de leur procès, a déclaré Human Rights Watch.

Plus de 200 personnes accusées de crimes de lèse-majesté

Le nombre de cas de lèse-majesté en Thaïlande a considérablement augmenté au cours de l’année écoulée, a déclaré Human Rights Watch. Après une interruption de près de trois ans au cours de laquelle les affaires de lèse-majesté n’ont pas été portées devant les tribunaux, le Premier ministre général Prayut Chan-ocha a ordonné en novembre 2020 aux autorités de rétablir les poursuites en lèse-majesté.

Depuis lors, les autorités ont inculpé plus de 200 personnes de crimes de lèse-majesté en relation avec diverses activités lors de rassemblements pro-démocratie ou de commentaires sur les médias sociaux.

D’autres critiques de la monarchie sont aussi accusés d’infractions de lèse-majesté dans le cadre du même sondage d’opinion publique.

Netiporn « Bung » Sanesangkhom et Nutthanit « Bai Por » Duangmusit du groupe Thalu Wang ont arrêtés tous les deux le 3 mai. Les autorités ont également arrêté Sophon « Get » Surariddhidhamrong, un militant du groupe Mok Luang Rim Nam, le 1er mai pour des accusations de lèse-majesté pour avoir prononcé un discours lors d’un rassemblement politique le 22 avril critiquant la monarchie. Il a également été placé en détention provisoire.

Une utilisation abusive de la détention provisoire

Détenir les personnes accusées de lèse-majesté en détention provisoire viole leurs droits en vertu du droit international des droits humains. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), que la Thaïlande a ratifié, encourage la libération sous caution des suspects

L’article 9 dispose que « la règle générale n’est pas que les personnes en attente de jugement sont détenues, mais la libération peut être assortie de garanties pour comparaître en jugement ». Ceux dont les charges n’ont pas été abandonnées devraient être jugés sans retard injustifié, a ajouté Human Rights Watch.