Professeur associé de sciences politiques à l’Université de Chulalongkorn à Bangkok, Giles Ji Ungpakorn, qui possède la nationalité britannique et thaïlandaise a quitté la Thaïlande à la fin de semaine dernière, après avoir été accusé de lèse majesté par les autorités thaïlandaises. Un crime puni très sévèrement par les tribunaux, et qui peut entrainer des peines de trois à quinze ans de prison
Giles Ji Ungpakorn, 54, est arrivé en Angleterre, après avoir été inculpé en vertu de la loi de lèse majesté, et pourrait être condamné jusqu’à 15 ans de prison s’il est reconnu coupable.

“Je ne pense pas que j’aurais droit à un procès équitable”

a déclaré Ungpakorn,  professeur  de sciences politiques à l’Université de Chulalongkom de Bangkok et journaliste au New Statesman (Singapour) et Asia Sentinel.

L'essai de Giles Ungpakorn écrit en 2006, à l'origine des accusations de lèse majesté

Ungpakorn, qui a une mère anglaise, et qui a étudié au Sussex et dans les universités de Durham et à l’École des études orientales et africaines de Londres, est l’auteur d’un essai intitulé “un coup pour les riches” (A coup for the Rich), dans lequel il critique le coup d’Etat militaire de 2006. Les accusations de lèse majesté retenues contre lui se réfèrent a des passages de son livre jugées insultantes pour le roi Bhumibol par la police thaïlandaise.

Mais selon  Ungpakorn la  loi sur la crime de lèse majesté est utilisée par les militaires pour empêcher tout débat concernant leur rôle dans la politique. Se référant à l’ambiance actuelle qui règne en Thaïlande dans les médias il a déclaré “Il y a un climat de peur”

Giles Ungpakorn est le deuxième journaliste du New Statesman qui a dû faire face aux accusations de lèse majesté au cours des derniers mois, le premier étant l’écrivain australien Harry Nicolaides, condamné à trois ans de prison le 19 Janvier denier, et toujours détenu à Bangkok, bien qu’il ait fait une demande de pardon royal.
Des universitaires du Royaume-Uni, Inde, Afrique du Sud, Turquie, France, Grèce, Pologne, Canada, Australie et  d’autres pays ont protesté, signant une pétition exprimant leur “vive inquiétude”.

La Thaïlande est à juste titre un modèle de liberté de la presse en Asie du Sud-Est. La presse est libre et variée, mais les journalistes ont tous un point en commun : ils s’auto-censurent pour ce qui touche à la monarchie.

constate Reporters sans frontière, qui appelle à une réforme rapide des lois régissant le crime de lèse-majesté.

Aujourd’hui, des milliers de sites Internet sont censurés en Thaïlande. La peur règne dans les milieux intellectuels. Un ressortissant Australien est détenu comme un criminel pour avoir écrit quelques lignes sur un prince thaï.

Comment en est-on arrivé là ? S’interroge a juste titre l’organisation basée à Paris. Alors que la Thaïlande s’efforce de restaurer son image de stabilité et de sérieux auprès de la communauté internationale et des investisseurs, un effort vers plus de liberté pour les medias semble maintenant nécessaire. Dans un pays qui se veut un modèle démocratique dans la région, il n’est pas concevable que la moindre critique (le passage incriminé dans le cas de Harry Nicolaides ne concerne que quelques lignes) soit punie de plusieurs années de prison. Enfin, si il est normal de vouloir protéger l’image du roi et de la monarchie, la loi ne doit pas être détournée de son objet pour empêcher tout débat politique. Ce n’est pas une insulte que de s’interroger sur l’avenir et la place de la monarchie en Thaïlande. Au contraire, c’est peut être l’absence de débat qui risque d’être fatal à une institution, certes très respectée, mais dont l’immense popularité repose avant tout sur la personne de l’actuel souverain.