Le film censuré d’Apichatpong Weerasethakul devrait sortir bientôt dans quelques salles de Bangkok, mais pas dans sa version complète, puisque les censeurs ont maintenu leurs exigences. Les scènes censurées seront remplacées par des écrans noirs, une manière pour le réalisateur de faire prendre conscience au public de la censure.
Après avoir lutté contre la censure de son film pour près d’un an, Apichatpong Weerasethakul va enfin projeter son célèbre “Sang Sattawat” (Syndromes and a Century), avec le silence, et le noir à l’écran pour remplacer les six scènes coupées par les censeurs thaïlandais.

«C’est cynique, mais en fait c’est une prise de position pour que le public prenne conscience qu’il est privé d’obtenir des informations dans cette société», a déclaré le réalisateur.

Avec l’élection d’un nouveau gouvernement et une nouvelle loi sur la censure, Apichatpong a présenté son film à la censure de nouveau, en espérant que les censeurs verraient son film différemment, mais c’est le contraire qui s’est produit: ils ont demandé que deux autres scènes soient coupées.

Apichatpong et son producteur Pantham Thongsang ont expliqué les intentions artistiques du film au bureau de la censure, mais leurs appels n’ont pas été entendus. Les censeurs ont caractérisé le film comme «non-artistique», et déclaré qu’il nuit à l’image du pays et de ses institutions. Le film a été réalisé en hommage aux parents d’Apichatpong, tous deux médecins, mais les censeurs ne l’ont pas vu de cette façon.

Les scènes censurées sont celles où le personnage du moine joue de la guitare et prétend être un extraterrestre, les scènes du docteur qui embrasse sa petite amie et le moment où l’on suggère qu’il a une brève érection après ce baiser, et une scène où le docteur boit de l’alcool.

“Syndromes” sera donc projeté sans les six scènes censurées, remplacées par le silence, et des écrans noirs – dont le plus long a une durée de sept minutes. Les recettes de la projection seront remis à la Thai Film Foundation.

Apichatpong Weerasethakul est né le 16 juillet 1970 à Bangkok, il débute sa vie professionnelle dans l’architecture en 1994 avant d’être diplômé de cinéma par l’école du Art Institute de Chicago en 1997.

Depuis le début des années 1990, il tourne des films documentaires ou expérimentaux centrés principalement sur des habitants et des régions modestes de la Thaïlande. Dans la première moitié des années 2000, il réalise trois longs-métrages formant une trilogie sur ce qu’il lui tient à cœur : Blissfully Yours sur sa passion pour le cinéma, Tropical Malady sur sa sexualité et ses peurs, et Syndromes and a Century sur ses parents médecins.[1] Les deux premiers sont présentés aux Festival de Cannes de 2002 et 2004, et le troisième à la Mostra de Venise en 2006.