La Thaïlande semble bien embarrassée avec le cas Viktor Bout, dont elle n’a apparemment que faire, mais que son allié de toujours, les États Unis lui a demandé de mettre sous les verrous. De nombreux commentateurs doutent en effet de la culpabilité de Bout, et voient plus dans cette opération une façon de déstabiliser la Russie.

L’histoire à tout pour faire un bon roman d’espionnage : un trafiquant d’armes (russe comme il se doit), un procès à rebondissement, une arrestation rocambolesque (dans un grand restaurant de Silom à Bangkok) et une possible extradition, délicate sur le plan diplomatique.

La biographie de Bout reste en grande partie à écrire : quarante-deux ans, né au Tadjikistan et parlant plusieurs langues, il aurait appris l’anglais, le français, mais aussi le persan et le zoulou. Il aurait vécu aux Émirats arabes unis, puis en Afrique du Sud. Viktor Bout est-il vraiment un trafiquant ou un simple intermédiaire au service de puissants personnages en Russie et en Ukraine ? Ethan Zuckerman pose la question sans trancher.

Viktor Bout est accusé par les Etats Unis d'avoir vendu des armes à la guérilla marxiste des FARC en Colombie.

«Viktor Bout n’est pas un vendeur d’armes, mais la Russie l’est, déclare son ami Richard Tchitchali, interrogé par les médias russes. Ce procès est contre la Russie», deuxième exportateur d’armes après les États-Unis. D’ailleurs ou se situe la limite entre un trafiquant et un honnête vendeur d’armes ? Pas facile de le savoir, surtout quand on parle de marché comme l’Afrique ou l’Amérique latine, où les mouvements indépendantistes et les guérillas sont légion.

Un journaliste d’Associated Press a remarqué que pendant le procès, un employé de l’ambassade américaine transmettait des notes au procureur thaïlandais.

«Je suis dans une position difficile, a déclaré le juge thaïlandais Jitakorn Patanasiri. Les relations bilatérales entre les États-Unis et la Russie sont peut-être en jeu».

Le tribunal pénal de Bangkok examine actuellement une demande d’extradition déposée par les Etats-Unis, motivée par la vente présumée d’armes aux rebelles colombiens.

Depuis un an, aucune preuve n’a été apportée contre moi à propos de crimes commis en Thaïlande ou ailleurs“, a déclaré l’homme d’affaires de sa prison de Bangkok mardi à la chaîne de télévision russe Vesti-24.

C’est une affaire purement politique“, a-t-il ajouté. Lors d’une audience au début du mois, un juge thaïlandais a déclaré que les Etats-Unis n’avaient toujours pas apporté d’éléments crédibles à l’appui de leurs accusations qui justifieraient l’extradition du suspect.

Franchement, les FARC ont-ils vraiment besoin d’un trafiquant russe pour s’approvisionner en armes, alors qu’ils sont déjà arrosé de munitions et d’armes en tout genre par Hugo Chavez…. Mais devinez où s’approvisionne Chavez ? En Russie bien entendu. En 2006 Hugo Chavez avait fait grand bruit en achetant quelques 100.000 kalachnikovs à la Russie pour un montant de 54 millions de dollars (42 millions d’euros). L’accord prévoit également la construction d’usines au Venezuela pour la fabrication de kalachnikovs sous licence russe.

Qu’est que la Thailande vient faire dans cette galère ?  Les Etats Unis sont en train de devenir un allié vraiment encombrant pour le royaume, avec plusieurs casseroles lourdes à trainer, dont la dernière est la présence de prisons secrètes de la CIA en Thailande. Le cas Viktor Bout est en train devenir aussi une question délicate, et très médiatique.

Les États Unis sont certes le principal partenaire commercial de la Thaïlande, mais depuis la crise du crédit, les exportations vers l’oncle Sam sont en chute libre. Du coup, sur le plan diplomatique, les relations entre les deux pays sont susceptibles d’évoluer : le président sortant George W. Bush aura consacré beaucoup de temps, et d’argent, a sa «guerre contre le terrorisme», entrainant un cout élevé  y compris pour ses alliés stratégiques en Asie du Sud Est, dont la Thaïlande fait partie. Bangkok aura été un allié réticent des campagnes militaires américaines, en fournissant un petit nombre de troupes a la coalition des volontaires en Irak, tout en permettant l’accès des avions américains a ses base aériennes pour la campagne d’Afghanistan.