L’ex-dirigeant du parti progressiste d’opposition thaïlandais Move Forward a promis de poursuivre le combat alors que son parti est confronté à une procédure judiciaire susceptible d’entraîner sa dissolution.
La Cour constitutionnelle a accepté de se prononcer sur la question de savoir si le parti a violé la constitution en proposant d’amender une loi qui interdit de diffamer la famille royale du pays. La pétition demandait la dissolution du parti et une interdiction de 10 ans de toute activité politique par ses dirigeants. Le tribunal n’a pas dit quand il se prononcerait sur cette affaire.
Le prédécesseur de Move Forward, le parti Future Forward, avait été dissous par la Cour constitutionnelle en 2020 pour avoir violé les lois électorales sur les dons aux partis politiques, mettant un terme à une ascencion fulgurante relatée dans le documentaire sorti cette semaine “Breaking the cycle”.
Pita Limjaroenrat, l’ancien chef de Move Forward, a présenté les détails des défenses juridiques du parti qui ont été soumises au tribunal lors d’une conférence de presse dimanche.
« S’il y a un État de droit en Thaïlande, je suis extrêmement confiant » que les arguments du parti prévaudront, a-t-il déclaré.
Pita a déclaré que la Cour constitutionnelle n’avait pas compétence pour statuer sur cette affaire et que la requête déposée par la Commission électorale n’avait pas suivi la procédure régulière car Move Forward n’avait pas eu l’occasion de se défendre avant que l’affaire ne soit soumise à la cour.
La requête a été déposée après que le même tribunal a statué en janvier que le parti devait cesser de préconiser des modifications de la loi, connue sous le nom d’article 112 dans les codes pénaux thaïlandais, qui protège la monarchie de la critique en imposant des peines de trois à 15 ans de prison par infraction.
Le parti Move Forward a révolutionné la politique thaïlandaise en remportant le plus grand nombre de sièges lors des dernières élections générales, mais s’est vu empêché d’accéder au pouvoir. Depuis, il a engagé plusieurs batailles juridiques pour maintenir ses positions au Parlement. Ces démêlés judiciaires sont perçus comme une composante de l’offensive menée par les forces conservatrices contre le mouvement progressiste du pays, dans le but de conserver leur mainmise sur le pouvoir.
La monarchie thaïlandaise est considérée comme intouchable, mais les manifestations pro-démocratie menées par des étudiants, déclenchées par la dissolution de Future Forward en 2020, ont commencé à remettre en question ce sentiment en critiquant ouvertement la monarchie.
Le groupe de défense Thai Lawyers for Human Rights affirme que depuis début 2020, plus de 270 personnes ont été accusées de violation de l’article 112. Certaines d’entre elles sont des élus de Move Forward.
Les tribunaux thaïlandais, en particulier la Cour constitutionnelle, sont considérés comme un rempart de l’establishment royaliste traditionnel du pays, qui les a utilisés ainsi que des agences étatiques nominalement indépendantes telles que la Commission électorale pour rendre des décisions visant à éliminer les opposants politiques.
Pita a averti que se débarrasser du plus grand parti d’opposition du pays signifierait « une attaque contre la démocratie » car cela affaiblirait le mécanisme de contrôle et d’équilibre des pouvoirs sur le gouvernement.
« La force de la démocratie ne réside pas dans la robustesse du gouvernement, mais dans la justesse et l’activité de l’opposition », a-t-il déclaré.
Le parti Move Forward a remporté les élections générales de 2023, après avoir fait campagne pour la modification de l’article 112 et l’introduction d’autres réformes démocratiques. Cette victoire a révélé la volonté de nombreux électeurs thaïlandais de changer après presque une décennie sous un gouvernement dominé par l’armée.
Mais le Sénat installé par l’armée a empêché le parti de prendre le pouvoir en refusant de confirmer Pita, qui était le candidat du parti au poste de Premier ministre. Les sénateurs ont déclaré qu’ils s’opposaient à Pita en raison de son intention de promulguer des réformes de la monarchie.